«The Lady»: le second combat d’Aung San Suu Kyi – Bible urbaine

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«The Lady»: le second combat d’Aung San Suu Kyi

«The Lady»: le second combat d’Aung San Suu Kyi

Publié le 27 avril 2012 par Alice Côté Dupuis

Après avoir foulé le tapis rouge des Césars avec une dizaine de films tous plus colorés et mouvementés les uns que les autres, Luc Besson laisse tomber avec The Lady le spectacle au profit du message.

S’il a remporté l’International Human Rights Award à Berlin pour ce long-métrage, ce n’est assurément pas pour son côté dénonciateur, mais plutôt pour son sujet lui-même, qui génère l’espoir: la défenderesse de la démocratie birmane, Aung San Suu Kyi.

De la Dame, nous ne connaissons que les ambitions politiques, la ferveur et la détermination à délivrer le peuple de Birmanie de la dictature qui l’oppresse en lui octroyant le droit de vote, et ce, de façon pacifique. Mais c’est plutôt sur son charme et sa relation amoureuse à distance avec le professeur britannique Michael Aris que Besson a choisi de focaliser le récit. Sans nier l’honorable combat d’Aung San Suu Kyi, ce fil conducteur permet d’effectuer des sauts dans le temps, mais il fait aussi en sorte que certains aspects primordiaux de la lutte ne sont qu’effleurés.

The Lady dépeint donc deux combats simultanés: celui pour les droits et libertés et celui d’une histoire d’amour entre deux âmes séparées qui veulent se réunir. Car en 1988, quand la Dame a foulé de nouveau le sol birman pour retrouver sa mère mourante, c’était pour ne plus en revenir, décidant désormais de concentrer ses énergies à sauver son peuple. Son mari et ses deux enfants restés en Grande-Bretagne jongleront donc avec les visas parfois refusés, les visites souvent écourtées et les téléphones dont on coupera toujours la ligne. La dictature militaire au pouvoir en Birmanie n’a aucune pitié, mais à en croire le récit de Besson, le premier ministre aurait cherché davantage à miner le moral et l’espoir d’Aung San Suu Kyi et de sa famille plutôt que ceux du peuple.

Si Luc Besson a fait fausse route en sélectionnant les aspects de la personnalité de son sujet et les éléments de sa lutte et de l’histoire qu’il souhaitait représenter, c’est sans doute que le film biographique ne le captive pas. Selon le Nouvel Observateur, The Lady aurait été une commande au cinéaste français, qui est plutôt habitué de créer des personnages hauts en couleur comme dans Le cinquième élément (1997) ou Nikita (1990). Cela expliquerait son manque de passion et sa vision plus fade de la véritable légende qu’est Aung San Suu Kyi. Toutefois, Besson sera resté fidèle à l’une de ses caractéristiques: ses images-chocs. La Thaïlande, lieu de tournage principal du film, comporte des paysages à couper le souffle, certes, mais il s’agit davantage de scènes d’émotions pures et poignantes qui demeurent gravées dans l’esprit du spectateur.

De toute évidence, la spécialiste des arts martiaux Michelle Yeoh livre ici la performance de sa carrière, mais celui qui surprend le plus, c’est David Thewlis. Ce Britannique et grand habitué des seconds rôles se surpasse en incarnant purement et simplement l’inquiétude et la vulnérabilité. Oui, ce sont les émotions pures que les acteurs ont su représenter et que le réalisateur a su capter, qui constituent la force de The Lady, à défaut d’avoir su faire en sorte que le combat d’Aung San Suu Kyi pour que la démocratie soit un droit accordé et respecté paraisse plus important qu’une relation amoureuse à distance. Car même aujourd’hui, treize ans après le décès de sa douce moitié, la Dame continue son combat avec le même acharnement. Une ferveur dont Luc Besson aurait eu avantage à s’inspirer avant d’accepter son contrat.

Appréciation: ***1/2

Crédit photo: Vincent Perez

Écrit par: Alice Côté Dupuis

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