CinémaCritiques de films
Crédit photo : Fox Searchlight
Rejouant la carte de l’infiltration mais dans une approche plus classique, l’équipe signe un scénario qui ne délaisse certainement pas un désir de provocation, tout en offrant bien plus qu’une simple variation sur un même thème. L’histoire? Une agente d’une compagnie de services privés qui s’infiltre dans un groupe d’anarchistes écologistes idéologiques qui commettent des actes terroristes envers des grosses compagnies qui nuisent à l’environnement et aux écosystèmes. Au fur et à mesure de son opération, le spectateur en viendra à changer sa façon de voir les choses et à reconsidérer sérieusement sa position dans toute cette histoire.
Mené tambour battant avec un rythme aussi percutant que fascinant, empruntant les dédales du suspense d’action classique, le film surprend par son histoire qui vise souvent juste dans ses avancées et par son impressionnante distribution qui pourrait difficilement être aussi convaincante et convaincue. Avec son ton qui a des airs de fin du monde, semblant appartenir à un point de non-retour qui nécessite des actions avant qu’il ne soit décidément trop tard, on s’embarque sans mal dans cette histoire comme si on la suivrait jour après jour aux nouvelles, tellement le réalisme est palpable et le sujet d’une nécessité qui pourrait difficilement être aussi adéquate à notre époque.
Moins éclaté que leur précédent opus, qui abasourdissait par sa forme narrative qui s’éloignait de toutes conventions, atteignant cette fois-ci l’élégance soignée d’un véritable blockbuster, on admire sans mal ce que l’équipe perd en audace, puisqu’elle le gagne en ambition, créant ainsi un film fortement soigné dans sa façon de vouloir nous y impliquer. Bien sûr, on regrette un peu le manque de surprises que le long-métrage affiche ici, mais on salue la force qui s’en dégage, jouant encore habilement avec notre façon de reconsidérer l’histoire au fur et à mesure, tout comme nos valeurs et nos morales, évoquant toute la force exercée sur notre mental que le cinéaste maîtrise avec subtilité.
Outre Brit Marling, qui prouve à nouveau son talent tout en montrant qu’elle n’est jamais autant impliquée que dans ses projets les plus personnels (rappelons qu’elle a co-signé le scénario avec le cinéaste), d’autres acteurs de renom confirment tout ce que l’on pensait d’eux, d’Alexander Skarsgaard à Patricia Clarkson, en passant par Shiloh Fernandez et Ellen Page, laquelle a rarement semblé aussi dévouée.
N’ayant jamais été très attiré par les grosses mise en contexte et les explications interminables des répercussions, Zal Batmanglij profite encore de sa prémisse très puissante pour nous laisser vivre l’histoire et la laisser agir sur nos croyances et notre capacité de réflexion. Du coup, le film commence au début, mais celui de la protagoniste, à savoir notre point d’identification, est déjà lancé quelque pas derrière l’histoire principale («the big picture» comme on pourrait l’appeler), alors que le film nous laisse sur un certain suspense qui semble nous laisser toute la place en tant que spectateur, un peu à la manière d’un documentaire qui dirait: «voilà, c’est à votre tour d’agir maintenant.»
Ainsi, ce film offre une portée qui est pratiquement certaine de faire réagir. Captivant en matière de divertissement, accompli en termes cinématographiques, voilà certainement un deuxième long-métrage qui continue d’exposer l’énorme potentiel de l’équipe Batmanglij-Marling, qui a par ailleurs convaincu sans mal Ridley et Tony Scott de s’intéresser à eux en agissant à titre de producteurs. Pour un film qui utilise les processus plus classiques pour livrer une histoire qui n’a pas peur de s’aventurer dans d’autres sentiers moins battus, il est certainement conseillé de voir ce très bon film conçu par des noms qu’on n’a certainement pas fini de voir défiler.
«The East» prend l’affiche ce vendredi 14 juin 2013.
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de la rédaction