CinémaCritiques de films
Suspense sensationnaliste qui en oublie les capacités intellectuelles du spectateur, The Call va pratiquement toujours là où on n’a pas vraiment envie qu’il aille. Pas nécessairement parce qu’il met nos nerfs à vif, mais plutôt parce qu’on se désole devant ce que l’on voit à l’écran…
Décidément, rien ne va plus pour Halle Berry depuis qu’elle a gagné son Oscar historique pour Monster’s Ball il y a déjà plus d’une décennie. De Catwoman, New Year’s Eve à Cloud Atlas, en passant par Movie 43, il y a longtemps que son nom ne rime plus vraiment avec qualité. Et si elle s’est frottée à quelques moments au suspense comme dans le peu mémorable Perfect Stranger, c’est plutôt Gothika, qui frôlait par moments le genre horrifique, qu’elle retrouve ici dans le bizarroïde The Call.
Reprenant le concept des Cellular et autres Phone Booth, l’audace et l’originalité en moins, prônant un girl power trip qui n’a décidément pas la jouissance de certains Tarantino (Kill Bill ou Death Proof, quelqu’un?), le long-métrage se penche autant du côté de la victime que de celle qui s’acharne à la secourir. Laissant ainsi jongler notre intérêt chancelant entre le destin d’une jeune en détresse, d’une intervenante en panique et d’une équipe de policiers mélangés. Du coup s’ajoutent de banales scènes d’action à un suspense qui aurait pu être plus psychologique que subjectif, en s’intéressant à une jeune fille qui se fait kidnapper et du lien qui se forme avec la répondante du 911 qui tombe sur son appel, employée qui a d’ailleurs vécu un traumatisant échec par le passé.
L’un des problèmes, toutefois, c’est que la complicité ne passe pas. Usant d’un mauvais montage de toutes sortes de scènes tournées à l’improviste, en sachant pertinemment que les interlocuteurs n’ont probablement jamais été mis en contact, sauf pour les scènes se déroulant côte à côte, on ne croit jamais à ce lien soit-disant si fort entre ces deux étrangères que le film s’amuse à dépeindre. Si l’on ne revient pas sur les capacités approximatives de Halle Berry qui a bien du mal avec un rôle aussi limité, ce n’est pas vraiment mieux pour Abigail Breslin, révélée de façon adorable dans les Little Miss Sunshine, Definitely Maybe et compagnie, qui passe par contre mal le cap de la puberté en se voyant compromise à se la jouer Dakota Fanning en mode War of the Worlds, donc, en petite fille blonde qui crie tout le temps. Pire, si ses réactions sont purement enfantines, on s’entête à dévoiler sans cesse ses attraits féminins pour la mettre en vedette sous toutes ses formes et coutures.
Du coup, vous l’aurez probablement déjà deviné, The Call est un film ambigu. Ni film d’horreur ni suspense ni drame ni film d’action, on pourrait aisément résumer le tout comme un film de série B, mais même là, on n’embrasse jamais véritablement cette possibilité, laissant toujours un certain sérieux en émaner. Si l’on pouvait donc résumer le film à un personnage, ce serait sûrement le kidnappeur en question, élément improbable par excellence, alors que son inconsistance psychologique n’égale pas l’historique qu’on s’amuse constamment à insuffler à son personnage de sa femme délaissée (pauvre Justina Machado qui a également bien du mal depuis la télésérie Six Feet Under) à un nébuleux passé qui justifierait ses gestes (était-ce nécessaire de tomber dans l’inceste?) Pire encore, la réalisation brouille constamment les pistes. À coups lassants de ralentis et d’arrêts photographiques sur mouvements, en plus d’inconfortables gros plans, on nous en met plein les yeux et les oreilles et on nous mouvemente le tout dans un suspense névrosé qui s’entête à constamment nous faire sursauter.
Dieu merci, on ne nous fait pas le coup du Basé sur des faits vécus et on ne tente pas de nous faire la morale comme on s’en rend compte par le biais de ce ridicule dernier acte qui touche les plus bas-fonds du ridicule cinématographique (préparez-vous à vous tapocher le front souvent). Cependant, il y a des limites à la souffrance, et si celle des personnages semble toujours s’enfoncer plus loin, celle du spectateur est sans limite.
The Call est donc un hommage à la victime, forte, mais poussée à bout, qui tente incessamment de se relever, mais qu’on tente également de constamment décourager. Dans ce cas précis, la victime, c’est donc vous, cher spectateur, qui de façon masochiste, on s’en doute, irez voir ce film en se disant que ce n’est sûrement pas si pire qu’on puisse l’annoncer. Et pour ça, avouons-le, la feuille de route par moment impressionnante en faisant foi, le long-métrage de Brad Anderson a bien quelques habiletés à nous garder sur les nerfs, mais la minceur maladive de son scénario ne manque jamais une occasion de nous faire perdre tout espoir. Ne dites donc pas que vous n’étiez pas prévenus.
The Call prend l’affiche au Québec le vendredi 15 mars.
Appréciation: *½
Crédit photo: Sony Pictures
Écrit par: Jim Chartrand