CinémaCritiques de films
Véritable splendeur visuelle qui s’avère époustouflante de son premier à son dernier plan, Oblivion ne révolutionnera pourtant en rien le cinéma de science-fiction, mais il prouve de pied ferme tout ce que Joseph Kosinski nous avait promis: la venue d’un cinéaste avec une vision et tout le talent nécessaire pour la mettre en œuvre.
Il y a quelques années, le nom de Kosinski n’évoquait pas grand chose, mais depuis son audace risquée quoique payante de livrer une suite près de deux décennie après au classique cinématographique et technologique que représente toujours Tron, on attendait de pied ferme son prochain projet qui, heureusement, ne fut pas une poursuite de la franchise qu’il a agréablement ressuscité. Dieu merci, on reconnaît aussitôt sa minutie et sa mise en scène assurées avec brio. Virtuose des cadres et des compositions d’image, il maîtrise le rythme et les mouvements avec une ingéniosité déroutante. Ce qu’il perd en action, il le gagne en hypnotisme, alors que la qualité de ses effets visuels donne droit à des images saisissantes.
Bien sûr, les films post-apocalyptique ne sont pas nouveaux et la Terre en mode dévastée, on en a vu des dizaines. Pourtant, on a ici l’impression d’en voir une vision différente de toutes les autres, où ce New York anéanti converge vers une beauté naturelle qui foudroie. Il faut dire que Kosinski multiplie les panoramas très larges et qu’il aime en offrir plein la vue. En prenant son temps pour que chaque exploration nous plonge dans une immersion totale sans la prétention d’un Avatar, on prend le temps de méditer sur l’univers, de quoi faire pardonner l’histoire qui a, malheureusement, des airs de réchauffé.
Sans nous fondre dans un certain ennui, le problème principal du scénario c’est son manque de fraîcheur. En recyclant des éléments évoquant tour à tour les nombreux Moon, WALL-E et l’inévitable 2001, l’odyssée de l’espace, pour ne nommer que ceux-là, on ne trouve pas beaucoup de surprises à se mettre sous la dent et on devine rapidement la majorité des revirements. Bien sûr, d’un point de vue narratif, le film garde constamment l’attention en captivant sans cesse le spectateur dans cet inconnu prédominé et ce sentiment qu’on ne sait jamais vraiment tout, mais encore là, disons que les derniers actes ne parviennent pas nécessairement à offrir tout ce que la première partie semblait promettre.
Il n’empêche, en terme d’ambiance, dur de trouver un long-métrage qui s’avère aussi complet. Pour accompagner le visuel à couper le souffle, un travail sonore impeccable est imposé alors qu’il est habilement appuyé par les compositions gracieusement épiques de M83, qui se rapprochent beaucoup du travail de Daft Punk sur Tron: Legacy, tout en mimant joyeusement les plus beaux tics de Hans Zimmer.
Certes, ce deux heures assez corsées qui ravivent des thèmes redits et qui étalent des splendeurs visuelles plutôt que de miser sur de l’action constante ne sera pas au goût de tous, étant bien loin d’une grande majorité de blockbusters plus conventionnels. Avec ce qu’il faut d’exigences intellectuelles, en plus d’étendre à nouveau des clins d’œil culturels par le biais de peintures, de musique et de romans, il y a de quoi savourer l’univers riche et plein de références que Kosinski met en place. En même temps, on ne manque pas de nous livrer des poursuites, des machines machiavéliques et une distribution tout simplement parfaite pour chacun des personnages. D’un Tom Cruise aventureux et curieux à une élégante Andrea Riseborough, on ne manque pas d’offrir de petits rôles à Nikolaj Coster-Waldau ou même Zoel Bell, alors que Morgan Freeman et Melissa Leo en imposent comme à leurs habitudes, malgré leurs présences somme toute limitées.
Du coup, Oblivion est sans contredit un spectacle. Un film de science-fiction convenu qui ne manque toutefois pas de trouvailles et d’inventivités, lequel s’amuse à se pointer à des endroits où on ne s’y attend pas. Sans être le bijou qu’on attendait, c’est un long-métrage qui demeure hautement satisfaisant et captivant, bref, de quoi redonner au cinéma à grand déploiement ses lettres de noblesse et justifier sans équivoque le déplacement vers les grandes salles (en IMAX même de préférence!) Le film ne changera pas notre monde, mais il magnifiera notre esprit, pas nécessairement en messages, mais plutôt en images (souvent fortes), ce qui est déjà beaucoup.
Oblivion prend l’affiche ce vendredi 19 avril, mais quelques représentations spéciales ont lieu ce jeudi soir en salles conventionnelles et IMAX.
Appréciation: ****
Crédit photo: Universal Pictures
Écrit par: Jim Chartrand