«Now You See Me» de Louis Leterrier – Bible urbaine

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«Now You See Me» de Louis Leterrier

«Now You See Me» de Louis Leterrier

Tour de passe-passe

Publié le 1 juin 2013 par Jim Chartrand

Crédit photo : Les Films Séville

Avec une prétention non-négligeable, le cinéaste Louis Leterrier essaie de réinventer le tour de magie et de parvenir à flouer cinématographiquement le spectateur. Heureusement pour lui, voilà que cette ambition le pousse peut-être à livrer son œuvre la plus réussie à ce jour, à défaut de ne pas trop chercher à en découvrir le truc ni même les ficelles qui ne se cachent jamais bien loin de l'attraction principale.

Au même titre que le récent Red Lights de Rodrigo Cortés, voilà un film où tout repose sur la révélation finale, l’ambiance et l’atmosphère générale en extra. Ou l’est-ce vraiment? C’est peut-être là tout le questionnement principal. Et si trop vouloir connaître la réponse pouvait en venir à gâcher le plaisir?

Tout d’abord, il faut vous mettre en contexte, bien que le film n’ait aucune difficulté à bien expliquer, si ce n’est sur-expliquer avec efficacité tout ce qu’il a à savoir. Il s’agit d’une bande de magiciens, les Four Horsemen, qui attirent l’attention de tous en volant inexplicablement une banque. Par la suite, ce qui n’était qu’un simple spectacle évolue en deux autres performances qui poussent l’audace plus loin et creuse la cervelle des autorités, notamment le FBI, sans pour autant s’expliquer davantage. Un double questionnement prend alors forme: comment ont-ils fait et quel est le but final de tout cela? Et c’est peut-être là où le bât blesse en apportant trop d’attention au second questionnement.

Le chemin pour se rendre vers l’explication ultime est extrêmement divertissant. Avec une distribution qui multiplie les gros noms, les répliques mordantes et l’action trépidante, Leterrier continue son mot d’ordre en décidant que plus on nous en met plein la vue, plus on nous empêche de respirer, et plus il devient facile d’étourdir le spectateur pour ainsi le manipuler.

Après tout, le slogan principal du long-métrage le dit: «Come in close, because the more you think you see, the easier it’ll be to fool you», et c’est exactement ce qui sert de mise en abyme. On se l’avouera, on ne retrouve pas ici le scénario ni l’idée du siècle, puisque le réalisateur rejoue aisément sur les thèmes d’imposture que The Prestige et The Illusionnist avaient déjà développés. Pourtant, on prend un malin plaisir à entrer dans le jeu et à essayer de prévoir les directions que le tout entreprend, pour ainsi avoir le sentiment d’être aussi brillant que les personnages et de trouver le moyen de s’identifier à plusieurs d’entre eux au fur et à mesure que le film progresse.

C’est d’autant plus ingénieux si on peut bien oser user d’un tel mot parce qu’on nous offre pratiquement toutes les perspectives possibles avec cette panoplie d’acteurs de talent et de personnages, en ne laissant pratiquement rien au spectateur qui n’a qu’à savourer, à défaut de vouloir lier les parties entre elles avant qu’on ne le fasse pour nous. On a droit à la perspective des voleurs, de ceux qui enquêtent sur eux, tout comme ceux qui suivent leur trace, en plus de laisser de la place à leur employeur et même à celui qui se fait voler, pour ne nommer que ceux-là. Mieux, avec un scénario plus soigné que la moyenne, le réalisateur trouve enfin la possibilité de faire usage d’une certaine mise en scène pour assouvir une idée plutôt qu’un principe, ce que ses nombreux Transporter, The Incredible Hulk et Clash of the Titan n’étaient jamais parvenus à lui offrir par le passé.

L’idée, donc? Relancer à nouveau le film de vol de banque et jouer à Robin des Bois, mais cette fois-ci avec des magiciens et des manipulateurs de la pensée, à la différence qu’ici on n’arrête devant rien pour montrer que la magie existe, et ce, même si on fait semblant de dévoiler les trucs ici et là. Après tout, on nous ensevelit d’effets spéciaux effectués efficacement sans trop d’effacement, et on se lance même dans une modification du réel et du visuel pour jouer sur la mince ligne de la tromperie, du trompe-l’œil et du mensonge.

Lancé comme un infernal tourbillon, voilà un blockbuster qui a le mérite de s’éloigner des sentiers battus sans pour autant dériver des principes de base, réchauffant avec une certaine intelligence ce qu’on a pourtant vu mille fois. Du coup, sans se réinventer, ces nombreux acteurs qu’on adore s’amusent littéralement dans ce grand terrain de jeu et font montre d’une complicité indéniable, qu’ils soient seuls ou accompagnés, s’assurant toujours d’avoir leur moment de gloire à un moment ou à un autre. Ainsi, on sera inévitablement attiré par les Jesse Eisenberg, Michael Caine, Morgan Freeman, Isla Fischer, Woody Harrelson, Mark Ruffalo et on passe, mais au moins, ce sera avec raison puisqu’ils demeureront intègres à eux-mêmes, livrant cette simili-commande en partie de plaisir autant pour eux que pour le spectateur.

Même le cinéaste se fait plaisir en ne reniant pas ses origines européennes, que ce soit en situant une partie de l’intrigue en France, en ajoutant la toujours délicieuse Mélanie Laurent, ou même en intégrant une pièce du groupe Phoenix au générique final. Des petits détails anodins mais qui font sourire, empêchant l’ensemble d’être une autre critique un peu fade du monde condamné de Las Vegas, comme le plus ou moins convaincant The Incredible Burt Wonderstone, qui nous a été livré un peu plus tôt cette année.

Bien sûr, l’acte final atteind un paroxysme un peu trop tiré par les cheveux avec un punch plutôt décevant, en plus d’ouvrir certaines portes à ce qui pourrait bien devenir une franchise (Hollywood oblige), pourtant, tant qu’on s’en tiend au plat de résistance, on sera certain d’être bien rassasié, tout en ayant l’impression (un peu faussée) d’avoir droit à quelque chose d’aussi frais qu’original.

Voilà donc un excellent film popcorn pour les fins de soirées ou les moments gris des fins de semaine à passer en salles sombre ou à l’air climatisé, puisque avec une partie de notre cerveau juste assez allumé pour le faire travailler un peu et l’autre part juste assez reposée pour simplement savourer l’ensemble, on est presque assuré de tenir tout un succès au bout des doigts.

«Now You See Me» est à l’affiche dès maintenant en salles.

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