Le court métrage «Offline Dating» de Samuel Abrahams – Bible urbaine

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Le court métrage «Offline Dating» de Samuel Abrahams

Le court métrage «Offline Dating» de Samuel Abrahams

Parce que Tinder fait moins mal qu'un couteau

Publié le 20 juillet 2015 par Simon Lafrance

Crédit photo : www.facebook.com/offlinedatingfilm

Depuis quelques jours, on peut voir le court métrage Offline Dating circuler sur Facebook et compagnie. C’est une création du réalisateur Samuel Abrahams qui se donne pour mission de réapprendre aux célibataires comment trouver l’amour sans l’aide des sites de rencontres et de leurs algorithmes.

Samuel invite donc son ami Tom à descendre dans les rues pour courtiser une fille.

Quelle fille? N’importe laquelle. Pas la girl next door qu’il espère croiser dans l’escalier, pas the one who got away à qui il rêve depuis la petite école, rien de tout ça. Ce que Tom veut, c’est une parfaite étrangère, la première qui voudra bien le suivre sur une Date.

Et ça, mon Sam, c’est mal. Très, très mal.

C’est mal parce que ton film remet en cause nos habitudes modernes de rencontres en ligne via les Tinder et OKCupid de ce monde. Bon. Juste que là, je te suis: défiler les profils d’êtres humains comme des voitures sur Kijiji n’a rien pour inspirer le prochain Woody Allen.

Avec cette déshumanisation, vient aussi la valorisation de l’apparence, la désacralisation de la sexualité et Blablabla, vous connaissez la chanson.

Mais ces crimes dont tu accuses la communauté web, cher Samuel – et lis très attentivement ce qui suit – tu t’en rends TOI-MÊME COUPABLE. Je m’explique.

Partir à la chasse, c’est partir à la chasse. Ça n’a aucune importance que ton terrain soit virtuel ou non, parce que Tom ne part pas séduire une collègue du bureau ou l’amie d’une amie dans une soirée – il a erré dans les parcs en abordant TOUTES les JOLIES filles qu’il a croisées, avec pour outils sa seule apparence et quelques mots d’introduction.

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«On serait pas aussi confortable sur Tinder»

Appelle ça du Tinder «grandeur nature» si tu veux, mon Samuel, mais ce n’est pas de cette façon qu’un être humain sensible arrive à connecter avec un autre être humain sensible.

Et puisque tu prétends te prêter aux méthodes «d’autrefois», laisse-moi te rappeler comment nos grands-parents se rencontraient à l’époque: les hommes entraient à l’usine et commençaient à perdre leurs doigts, parfois un œil. Le dimanche, à l’église, les femmes choisissaient les moins amochés.

Pas mal différent de ton rôdeur qui court littéralement vers une joggeuse pour la rattraper.

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«Si j’te pogne, j’te mange!»

Toujours confus? Tourne ton court métrage le soir, remplace Tom et son visage d’enfant laiteux par un homme adulte et regarde combien de ces filles appellent la police. À moins qu’elles ne soient toutes des actrices mandatées?

Autrement, une femme apostrophée de la sorte n’a pas bien le choix de rester polie et s’excuser d’un «je suis en couple» ou «je suis lesbienne». Comme si c’est tout ce qui les retenait d’abandonner leurs plans pour suivre Tom les yeux fermés…

Parce qu’à mesure qu’un garçon vieillit, le danger que représente un étranger perd de son sens: on grandit, on prend du muscle, et nous agresser exige de plus en plus de courage à un criminel qui, pour même songer au viol, en manque visiblement.

Ce n’est malheureusement pas le cas des filles qui… Wow. Je me rends compte que cet édito se transforme en intervention sur la culture du viol et ça me gêne un peu, Sam. Tu vois ce que tu me fais écrire?

"J'ai des bonbons dans ma vanne"

«J’ai des bonbons dans ma vanne»

Revenons plutôt au film qui termine – spoiler alert! – avec cette fille assez brave pour accueillir Tom… CHEZ ELLE?! Bout de viarge, Samuel! Même sur Tinder, c’est la première règle: n’invite personne chez vous le premier soir!

Là c’est Tom qui se met en danger! Quel genre de croque-monsieur invite un étranger et son caméraman chez elle? Et elle l’embrasse déjà?! Saint-Baseball, les gars! Avez-vous au moins changé vos noms? Dites-moi que vous avez apporté vos propres condoms!

Eh la, la…

Et l’autre qui renverse sa bière à table… Tout le monde trouve ça drôle? Non. Je m’excuse, mais le jour où j’accepte qu’un étranger se joigne à mon piquenique et me prenne une bière, il est bien mieux de ne pas la gaspiller.

Tout ça pour dire qu’on peut tout critiquer dans la vie. On peut rire de tout et même tout haïr. Il faut d’ailleurs apprécier lorsqu’un débatteur propose des solutions de rechange plutôt que de critiquer sans ne rien apporter.

Ce que ton film suggère toutefois, Samuel, c’est quatre 30 sous pour une piastre. Tu désires nous débarrasser d’un simulacre virtuel, mais tu le remplaces par un autre idéal tout aussi fantaisiste.

Dans mon livre à moi, j’appelle ça un flop.

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