«Le baptême de…» Christopher Nolan – Bible urbaine

Cinéma

«Le baptême de…» Christopher Nolan

«Le baptême de…» Christopher Nolan

«Following» (1998), ou l'ascension du chevalier de l'intrigue

Publié le 25 avril 2016 par Alyssia Duval

Crédit photo : The Criterion Collection

Si Batman est le héros que Gotham mérite, Christopher Nolan est celui que nous, humbles cinéphiles, méritons. Et comme tout héros a son origin story, il me semblait essentiel d’explorer les débuts de ce réalisateur visionnaire (pour ne pas dire révolutionnaire) selon qui un film se doit d’être une expérience à la fois sensorielle, psychique et émotionnelle, et qui a su démontrer à plus d’une reprise qu’il est parfaitement possible de produire un blockbuster intelligent.

Je pourrais dédier une chronique entière à la manière dont la trilogie The Dark Knight a complètement redéfini la formule du film de superhéros, ou encore à l’analyse de la chronologie fragmentée de Memento, aux différents niveaux d’interprétation dans Inception, aux principes astrophysiques d’Interstellar, puis une autre à ses concepts philosophiques. Mais l’objectif de ce billet est plutôt de découvrir ce qui a précédé ces multiples exploits, la pierre angulaire de l’œuvre de Christopher Nolan, et celle-ci s’intitule Following.

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On ne devient pas l’un des cinéastes les plus applaudis de sa génération sans y investir beaucoup de temps, d’argent, et surtout d’absolu dévouement. Alors qu’Interstellar a bénéficié d’un budget astronomique de 165 millions de dollars – pardonnez le jeu de mots –, le premier long-métrage de Nolan, pour sa part, n’aura nécessité qu’un maigre 3 000 livres sterling… Soit toutes ses économies de l’époque. Tourné les fins de semaine avec très peu de matériel et une petite poignée d’acteurs sans expérience (tous des amis du réalisateur), Following est quand même parvenu à faire la tournée des festivals en 1998 et, forcément, à impressionner la critique par son audace, l’ingéniosité de son intrigue et la qualité de son esthétique, raflant quelques prix au passage.

Ouvrage en noir et blanc d’à peine 70 minutes, il raconte l’histoire d’un écrivain en herbe (Jeremy Theobald) qui, pour trouver l’inspiration, commence à suivre des gens dans les rues de Londres, au hasard, et à les observer de loin en s’interrogeant sur leur vie. Inévitablement, l’aventure se corse lorsqu’il est remarqué par un mystérieux homme en costume (Alex Haw), dont la profession de cambrioleur expert procurera au jeune auteur beaucoup plus que ce qu’il espérait en termes d’histoires à raconter. Ajoutant à l’équation une femme fatale aux intentions nébuleuses (Lucy Russell), Following appartient sans contredit au genre du film noir, avec ses contrastes évidents, sa psychologie obscure et ses nombreux revirements de situation.

Tout comme son protagoniste, le spectateur est un voyeur, un observateur actif. On épie les personnages en ayant l’impression de n’en connaitre que la surface, cherchant farouchement à déchiffrer leurs faits et gestes en sachant très bien que les eaux sont troubles derrière la façade.

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Ce qui définit le mieux le cinéma de Christopher Nolan est le fait que chaque film est une énigme à résoudre, chaque scène une pièce d’un grand casse-tête, chaque personnage un univers en soi. Bien qu’il s’agisse de son premier scénario de plus d’une heure, Following ne fait pas exception à cette règle et représente, en rétrospective, une entrée en matière étonnamment évocatrice de ce qui suivra dans la carrière du réalisateur anglo-américain. On y voit même surgir un logo de Batman sur une porte d’appartement, ainsi qu’un personnage important nommé Cobb, patronyme que reprendra celui de Leonardo DiCaprio dans Inception, plus de dix ans plus tard.

Écrit, financé, réalisé, photographié, monté et produit par Nolan lui-même, Following symbolise son art dans sa forme la plus modeste, et pourtant l’œuvre est d’une telle richesse visuelle et narrative qu’on a du mal à croire qu’il s’agisse d’une première, et encore moins qu’elle ait coûté si peu.

Avis aux fans: Christopher Nolan sera de retour sur nos écrans en 2017 avec Dunkirk, un nouveau scénario original inspiré de la Seconde Guerre mondiale et mettant en vedette Tom Hardy, Cillian Murphy, Kenneth Branagh et Mark Rylance.

Mon coup de cœur par Christopher Nolan: «Interstellar» (2014).

Prochaine chronique à surveiller: «Mondo Trasho» (1969) de John Waters.

https://www.youtube.com/watch?v=D82ZQKjPOj4

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