Cinéma
Crédit photo : Netflix
**Attention, cet article contient quelques spoilers.**
Pour ceux et celles qui ont manqué les deux saisons précédentes, la série GLOW, produite par Liz Flahive and Carly Mensch s’inspire de l’histoire vraie de la première équipe de lutte féminine américaine formée dans les années 1980 à Los Angeles. Les saisons un et deux racontaient la constitution de l’équipe, leur apprentissage de la lutte et leur graduelle percée médiatique tout en développant les intrigues personnelles des personnages principaux.
Porté par un casting de grande qualité, des personnages attachants, des dialogues drôles et enlevés, GLOW a rapidement trouvé son public et remporté les louanges des critiques. Humour, féminisme, musique eighties et looks improbables sont au rendez-vous. Ayant adoré les deux premières saisons, j’avais hâte de découvrir la troisième.
La saison deux s’achevait sur l’annonce d’une résidence à Las Vegas pour la troupe de GLOW, consécration de leur succès. La saison trois s’y déroule donc, à l’hôtel-casino Fan-Tan, où la troupe réside, mange et présente le show, le même tous les soirs pendant des mois et des mois. On pouvait s’attendre au strass et aux paillettes en déplaçant le cadre de la série à Vegas, mais après un moment d’excitation et un premier épisode ayant en toile de fond l’explosion en plein vol de la fusée Challenger, les membres de la troupe s’ennuient, se laissent aller et tournent en rond.
On ne voit pas beaucoup de lutte cette saison, un choix qui représente la perte d’intérêt des membres de GLOW pour leur gagne-pain. Le show étant sur repeat, il n’a plus rien d’excitant pour les performeuses, le réalisateur et le producteur. Mais la lutte était un élément central de la série: la mise en scène des shows créait des opportunités constantes pour développer de nouvelles histoires entre les personnages et apporter de l’humour.
Privée de lutte, la série perd de sa vigueur et de sa spontanéité. Les seuls shows que l’on voit sont ceux qui chamboulent le quotidien, insufflent de l’énergie et un vent de renouveau, tant pour l’équipe de GLOW que pour les spectateurs (épisodes 5 et 10). Ces deux épisodes sont aussi les meilleurs de la saison, de concert avec l’épisode 6, durant lequel la plupart des Gorgeous Ladies partent camper dans le désert et rompent avec la monotonie de leur vie à Vegas.
À Vegas, l’atmosphère de l’hôtel est donc étouffante et les personnages semblent piégés. En manque de stimulation et pris dans un quasi-huis clos, les personnages se cherchent et se questionnent sur eux, en venant à penser à l’avenir. Est-il en dehors de GLOW?
C’est dans le développement des personnages que cette troisième saison se rattrape. Les quatre personnages principaux — Ruth (Alison Brie) jouant sur scène Zoya the Destroyer, Debbie (Betty Gilpin) qui incarne Liberty Belle, ainsi que le producteur Bash (Chris Lowell) et le réalisateur Sam (Marc Maron) — traversent d’importantes remises en question au cours de la saison.
Le personnage de Debbie est à mes yeux la plus belle réussite. Les scénaristes lui ont donné un arc narratif multifacette, abouti et fouillé, allant de son rapport à la maternité à ses relations aux hommes et à son émancipation professionnelle. Debbie achève la saison sur une note haute, ayant accompli pour elle-même tout ce qu’elle espérait.
À l’image de Debbie, le personnage de Sam progresse, mais il ne le fait pas à Vegas. Complètement désœuvré au début de la saison, il trouve sa voie en dehors de GLOW auprès de sa fille Justine (Britt Baron). On gardera le mystère pour vous laisser profiter de la série sans trop de spoilers!
À l’opposé de Sam et Debbie sont Bash et Ruth. Leurs prises de conscience sont là; pour Ruth il s’agit évidemment de sa carrière d’actrice, pour Bash il s’agit de sa sexualité, un sujet abordé dans la deuxième saison. Mais le serpent se mord la queue malgré les rebondissements. Ruth est encore et encore confrontée à l’échec, tandis que Bash, désormais marié à Rhonda «Britannica» (Kate Nash), continue à faire l’autruche et à réprimer ses émotions. Avec Debbie, Bash est sans conteste l’un des personnages les plus aboutis de la saison.
GLOW compte une douzaine de personnages secondaires dont le développement pose un important défi pour les scénaristes. Les choix narratifs de ces derniers n’aboutissent alors pas toujours. Certains personnages ne disposant que de peu de lignes de dialogue finissent avec des histoires trop rapidement expédiées; les questions raciales évoquées au travers de Jenny «Fortune Cookie» (Ellen Wong) en sont un exemple.
Cette troisième saison donne néanmoins plus de place, entre autres, aux personnages d’Arthie «Beirut the Mad Bomber» (Sunita Mani) et de Sheila «The She Wolf» (Gayle Rankin), dont les arcs narratifs incarnent le fil conducteur de la saison, orienté vers la quête d’identité et l’acceptation de soi. L’histoire d’Arthie est centrée sur sa relation amoureuse avec Yolanda «Junkchain» (Shakira Barrera) la reconnaissance de son homosexualité et la confrontation avec l’homophobie.
L’histoire de Sheila, plus développée, permet au personnage de quitter son costume de louve et d’embrasser son désir de devenir actrice. Elle y parvient soutenue par la drag-queen Bobby Barnes (Kevin Cahoon), une nouvelle addition attachante au casting venant solidifier les story lines queer.
En conclusion, bien que solide et agréable à regarder, cette troisième saison manque d’énergie, d’humour et de glow. Le dernier épisode est néanmoins plein de rebondissements et promet des développements intéressants pour une potentielle quatrième saison, qui n’a pas encore été confirmée par Netflix.
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