«La délicatesse» de David et Stéphane Foenkinos: la finesse en moins mais le rire en plus – Bible urbaine

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«La délicatesse» de David et Stéphane Foenkinos: la finesse en moins mais le rire en plus

«La délicatesse» de David et Stéphane Foenkinos: la finesse en moins mais le rire en plus

Publié le 26 avril 2012 par Annabelle Moreau

La délicatesse arrive sur les écrans québécois après un accueil mitigé dans l’Hexagone à la fin 2011. C’est peut-être parce que le film des frères Foenkinos n’arbore pas autant de délicatesse qu’on le croyait. Ovni pour les uns, étrange comédie sentimentale pour les autres, le film est plus beau que bon. Le rire est toutefois au rendez-vous.

David et Stéphane Foenkinos, romanciers et directeurs de casting de métier, ont uni leurs voix et leurs forces pour un premier long-métrage adapté du 8e roman du frère cadet. Sorti en 2009 chez Gallimard, le roman a déjà été écoulé à plus de 700 000 exemplaires. Un best-seller quoi. Particulièrement apprécié de la gent féminine pour tout dire.

Bref, avec pour seule expérience comme réalisateurs le court-métrage Une histoire de pieds (2006), les frères ont voulu frapper fort avec leur adaptation: David au scénario, en tandem à la réalisation, Audrey Tautou et François Damiens pour crever l’écran, et la musicienne Émilie Simon aux commandes de la trame sonore.

L’histoire se corse quand vient le temps de résumer le film: c’est un 3 pour 1. Le scénario parfois maladroit défie cependant la narration traditionnelle «rencontre + obstacles + baiser». Nathalie (Audrey Tautou) vit dans le premier tiers du film un amour fusionnel avec François, l’homme de sa vie (Pio Marmai). Le couple se marie, est au paradis et illumine les rues et les cafés parisiens.

Ce bonheur est toutefois de courte durée. Moins d’une demi-heure après le début du film, le pavé est fatal à François, parti plus tôt faire son jogging. Nathalie s’abime alors dans le travail pour une mystérieuse entreprise suédoise et trois ans après la tragédie, veuve à plein temps ayant pour seule distraction sa meilleure amie Sophie (Joséphine de Meaux), elle embrasse sans raison Markus (Damien, désopilant) l’un de ses subordonnés, Suédois aussi discret que délicat. Voilà pour le titre.

Résistant d’abord aux charmes incertains de son collègue maladroit et au physique, disons-le, plutôt ingrat (même si dans les faits Damien est bien loin du Quasimodo que l’on tente de lui imposer), dans le second tiers du film ce couple plus qu’improbable se découvre dans le rire et la simplicité. Une scène est particulièrement réussie sur les bords de la Seine, tour Eiffel illuminée derrière Madame en prime: «C’est ridicule, je vais tomber amoureux!», scande Markus avant de prendre les jambes à son cou.

C’est la réalité de leur invraisemblable union qui les rattrape dans le dernier tiers. Mais, «le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point», disait Pascal, et envers et contre tous (son amie Sophie, son patron qui lui fait des avances disproportionnées), Nathalie fait le deuil de François et s’enfuit chez sa grand-mère avec Markus. L’amour est enfin consommé.

La mise en scène peut surprendre et si elle rappelle parfois celle de Jean-Pierre Jeunet (Le fabuleux destin d’Amélie Poulain, La cité des enfants perdus, Delicatessen) pour les détails qui dérangent, mais émoustillent, La délicatesse emprunte aussi du mordant à certaines comédies romantiques britanniques dont Coup de foudre à Nothing Hill, mais en version parisienne. C’est d’ailleurs un film très parisien. Intérieurs, décors, rues, vêtements: tout est là pour rappeler la magnificence, mais aussi l’éclectisme de la capitale française.

À la fois drôle, cynique et décapant, les rires sont vrais et sincères, parfois même incontrôlables, surtout dans le second tiers. L’ambiance du film est toujours un peu décalée et c’est à se demander si les frères Foenkinos sont en plein contrôle de leurs effets, ou s’ils sont seulement maladroits. L’élégance surannée fait de La délicatesse une étrange romance, inégale certes, mais donnant tout de même envie de se plonger dans la lecture du roman qui l’a inspirée.

«La délicatesse» prendra l’affiche le 27 avril 2012.

Appréciation: ***1/2

Crédit photo: Films Séville

Écrit par: Annabelle Moreau

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