«La guerre des tuques 3D» de François Brisson et Jean-François Pouliot – Bible urbaine

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«La guerre des tuques 3D» de François Brisson et Jean-François Pouliot

«La guerre des tuques 3D» de François Brisson et Jean-François Pouliot

La guerre, la guerre, c'est pas une raison pour faire un remake

Publié le 6 décembre 2015 par Alexandre Beauparlant

Crédit photo : www.facebook.com/laguerredestuques3d

À l'occasion de son 30e anniversaire, La guerre des tuques s'octroie une cure de jouvence. L'histoire que l'on connaît, racontée sous la forme d'un film d'animation, en 3D! 30 ans, c'est loin... On sait que certains alcools prennent du mieux avec l'âge, et que d'autres, comme ces bières recueillies dans les eaux boueuses d'épaves séculaires, développent au contraire une flaveur rappelant la chèvre. Le goût laissé en papilles par La guerre des tuques, l'original, se situe quelque part entre ces deux extrêmes. L'idée d'un remake fait donc amplement de sens.

L’impact de La guerre des tuques sur une génération entière ne fait aucun doute. J’avais moi-même un souvenir favorable, quoique vague, à sa pensée (l’ayant revu à l’âge adulte, je crois encore qu’il s’agit d’un film sympathique, bien que grandement surévalué).

Pointer le doigt sur les failles de ce film culte, c’est un peu comme une mère qui parlerait en mal de son enfant moche: ça ne se voit que très peu. L’amour rend aveugle, c’est bien connu.

En vue des standards de 2015, le film original est fait tout croche, mais… il a du cœur. Pour un enfant ayant grandi au Québec dans les années 1980 et 1990, la réplique «La guerre, la guerre, c’est pas une raison pour se faire mal» est probablement autant célèbre que le fameux «Luke, je suis ton père» (tirée d’un film obscur dont j’oublie le nom).

Quelques répliques. Le fort de neige. Le chien. Quelque chose de triste en rapport avec le chien. D’ailleurs, le titre choisi pour la version anglaise de La guerre des tuques se lit ainsi: The dog who stopped the war. Le chien meurt à la fin. Si vous êtes en âge de lire une critique sur un webmédia culturel, cette information, vous la connaissez déjà. Et puis, si vous ne savez pas lire, eh bien, vous êtes le public cible de ce film. Papa et maman se chargeront de relayer le message. Ou d’avoir une bonne discussion sur le concept de mortalité.

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On en vient à oublier le reste. Comme ces enfants qui balançaient leurs répliques avec autant de finesse qu’un mandrill se ruant dans les allées d’un magasin de porcelaine chinoise. Ou encore ce manque de dynamisme qui s’accentue au fil des diffusions annuelles de Ciné Cadeau.

Pour pallier à ces problèmes, une solution intéressante: éliminer les enfants. Fini, donc, l’impression d’assister à un projet scolaire mettant en vedette la classe de cinquième année d’une école inconnue. Bien joué! Quoiqu’en y repensant, la voix de certains doubleurs peut agacer, notamment celle d’André Sauvé incarnant les jumeaux, toujours accompagnés par un étrange écho en sourdine.

Ce remake s’adresse à un public très jeune. Le côté cartoonesque en fait foi, avec tous ces sauts et projections de personnages à des hauteurs impossibles, ce fort devenu hyper technologique, les ralentis à la Matrix… En contrepartie, on tient là un exposé ravissant du travail accompli par les artistes du département d’animation. Vraiment, compte tenu du budget, les créateurs d’ici n’ont rien à envier aux grosses productions de Pixar et Dreamworks.

On a aussi coupé dans le gras pour raconter l’histoire en se concentrant sur les moments forts. Beaucoup d’attention et d’affection furent injectées dans cette refonte. On le sent. Par le (trop grand) respect accordé à la matière source, quitte à ne presque rien éliminer ou proposer de neuf.

La liste des collaborateurs ayant contribué à la trame sonore est impressionnante. Groenland, Céline Dion, Louis-Jean Cormier, Marie-Pierre Arthur, Fred Pellerin et même Marie-Mai ont répondu à l’appel sans se faire prier. Le résultat est d’une mièvrerie homogène dans sa fadeur et devrait faire un carton chez les marchands de disques à l’approche de la visite du père Noël.

En définitive, cette remise à neuf n’aura pas le même impact que son illustre prédécesseur. La compétition est tout simplement trop forte et de qualité de nos jours, en matière de films pour enfants. Surtout lorsqu’on pense que The Good Dinosaur, un effort pourtant mineur de la bande de chez Pixar et sorti à peine deux semaines plus tard en salle, représente une expérience bien plus divertissante.

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