«Don Jon» de Joseph Gordon-Levitt, mettant en vedette Scarlett Johansson – Bible urbaine

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«Don Jon» de Joseph Gordon-Levitt, mettant en vedette Scarlett Johansson

«Don Jon» de Joseph Gordon-Levitt, mettant en vedette Scarlett Johansson

De talentueux comédien à réalisateur ludique

Publié le 9 octobre 2013 par Manuel Yvernault

Crédit photo : Voltage Pictures

Cela faisait un petit moment que Joseph Gordon-Levitt n'avait pas mis la main sur une caméra. Plus par envie que par principe, où chacun des acteurs de la planète veut passer derrière la caméra uniquement parce que cela semble «in». Avec plusieurs courts-métrages à son actif depuis son premier essai Sparks, une adaptation libre d’un roman d'Elmore Leonard, et l’acteur passe enfin au long-métrage. Comme on est jamais mieux servit que par soi-même, il en est également l’auteur.

Ayant participé à de nombreux films où les réalisateurs avaient leur «marque» de fabrique, Joseph Gordon-Levitt a été à bonne école (Christopher Nolan, Rian Johnson, Gregg Araki, Marc Webb et Steven Spielberg ont dû savamment et indirectement lui porter conseils).

Et s’il est plus facile de financer un projet cinématographique quand on a un «nom», cela ne veut pas dire pour autant que la qualité sera au rendez-vous. Et pourtant le jeune comédien s’en sort très bien, étant habile autant dans le fond que dans la forme de son film.

Car si le sujet de ce jeune homme en quête d’amour et accro aux films pornographiques pouvait batifoler au plus proche d’un traitement vulgaire et graveleux, le jeune cinéaste réussit le pari de ne jamais tomber dans la facilité, et marche délicatement sur les bordures de la comédie romantique (voire comédie dramatique).

Esthétiquement, nous sommes clairement loin d’un cinéma classique, et on sent fréquemment le désir du réalisateur de faire de son film un objet dynamique visuellement. Pourtant, il ne prend jamais le virage si facile d’un film façon pub ou clip. Nombreux mouvements de caméra, tournés vers l’exercice d’un montage joueur, d’un rythme très dynamique, Joseph Gordon-Levitt ne réinvente rien, mais il s’approprie avec savoir-faire une grammaire cinématographique déjà connue. On pense notamment au film de Marc Webb 500 jours ensemble, dans lequel il tenait le rôle principal. Il ne pêche jamais par maniérisme et fait cependant preuve d’un réel engagement dans ce qu’il tend à démontrer par l’image.

Nombreux sont donc les mouvements de caméra judicieux pour le coup, et la musique prend dans ce même désir d’échapper à toute forme conservatrice un rôle assez important.

Le film reflète étrangement une certaine sympathie, fidèle à son auteur. Si le sujet ne renversera pas la géopolitique du monde, il fait face au genre dans lequel il s’inscrit.

Étude sans jugement de la vie par procuration, le scénario établit un discours simpliste mais efficace sur la façon de vivre actuelle. D’un côté, les tribulations monomaniaques d’un pornophile, de l’autre sa rencontre avec cette fille fan de comédies romantiques hollywoodiennes. Comme si la critique du genre par le genre était plus efficace. Aucune prétention dans l’intention en tout cas. À cela s’ajoute un léger regard acerbe sur le fait qu’Internet a changé nos modes de communications et de vie.

Le film pourrait se suffire à lui-même, mais heureusement on peut compter sur un très bon casting. Scarlett Johansson tient parfaitement son rôle, un plaisir nostalgique de retrouver Tony Danza, vraiment doué dans son rôle de paternel italien, et Julianne Moore, une fois de plus, parfaite dans un rôle qui demandait une certaine subtilité pour qu’on y croit pleinement. Rôle qui prend délicatement son importance et donne finalement toute sa force au film.

Don Jon ressemble à son auteur (fidèle du Saturday Night Live au passage, bon client des nights shows américains), film simple dans sa trame, laquelle est méticuleusement mise en scène, enjoué par une savoureuse réalisation et relativement solide dans son propos, pas prétentieux et véritablement maîtrisé.

On attend donc la prochaine réalisation de Joseph Gordon-Levitt qui amène, lors des dix dernières minutes, une ultime ascension plus sérieuse que le reste, mais qui colle parfaitement à l’ensemble. Si la forme de cet épilogue peut nous prévenir de la suite, on a alors hâte de voir à nouveau le déjà talentueux comédien à nouveau derrière la caméra.

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