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Trois ans après son premier album Jusqu’aux oreilles, toujours sous la tutelle de la maison Audiogram, la jeune Amylie revient avec Le royaume, un second album qui nous la présente sous un nouveau jour tout en douceur et en légèreté, invitant rapidement au bonheur. Comment résister?
Même si on avait voulu très fort, il aurait été impossible d’envisager ce surprenant tournant à saveur pratiquement exotique qu’a entrepris Amylie. Réalisé cette fois par Antoine Gratton et multipliant les collaborations notables comme la présence des forts talentueux Daniel Bélanger, Damien Robitaille et Daniel Boucher, il est malgré tout improbable de parvenir à mettre précisément le doigt sur toutes les inspirations qui l’alimentent. C’est que l’auteure-compositrice-interprète n’hésite pas à multiplier les genres et, si elle continue les explorations comme elle le faisait sur son premier disque, elle cherche ici un son plus homogène, s’assurant de garder plus consistant son périple sans jamais cesser de nous étonner à chaque chanson. Plus libre, habitée d’une assurance qui se ressent immédiatement par sa voix plus affirmée, elle n’a pas peur d’aller au-delà de ses désirs, qui se ressentaient par les nombreuses directions que son premier disque esquissait timidement.
Fini le ton plus monotone, mélancolique et grisâtre de ses premières chansons qui voulaient faire passer beaucoup d’émotions et de vécu. Les textes plus épurés sont allés voir ailleurs et sont moins condensés, s’assurant de garder ainsi une proportion respectable entre sa belle poésie, la place consacrée à la musique et les mélodies surprenantes que l’artiste se force de dénicher. Si l’on ne trouve rien d’aussi poignant que les douces «Au creux de ta main» ou «Soigner ton cœur» de son premier opus, on se permet néanmoins d’offrir du rythme et des pièces certainement plus mouvementées et entraînantes, voire planantes, que «Mes oreilles», l’une des grandes surprises sur son premier disque. On le réalise immédiatement auprès de la trop courte mais libératrice «Les filles», au même titre que «La mélodie», pièce d’ouverture qui agit comme les balbutiements d’une renaissance nécessaire.
De son côté, «La fête» porte très bien son titre, alors que le sourire ne cesse de nous accompagner au fil de pièces comme «La bête», qui est particulièrement amusante. C’est que le désir de rassembler est grand et à travers des claquements de doigts, des souffles de saxophones, des élans de chœurs qui nous poussent à vouloir les rejoindre, et autres sages utilisations musicales qui enrichissent grandement le son de l’album (un «chachacha» bien lancé sur «Colombe»!), on se déhanche certainement. C’est d’autant plus invitant lorsque Amylie laisse aller son côté funk/hip-hop, qu’elle explore avec une belle aisance sur des titres comme les accrocheuses «Comme une reine», «Tais ta tête» ou «Sombre». Sans jamais être entièrement blues, jazz ou même pop, mais en étant un peu tout à la fois, elle parvient même à convaincre avec le détour plus soul de la charmante «On se trouve».
Musicalement riche et aussi coloré que l’est l’attrayante pochette, ce nouveau disque d’Amylie ravive l’intérêt pour une artiste qui s’assure de fasciner toujours un peu plus à chaque écoute, étant donné le grand nombre de richesses qui se dévoilent chaque fois. La grande gamme d’instruments et le soin apporté à l’ensemble en font un excellent deuxième disque qui ne peut que promettre davantage d’intérêt pour l’avenir, qui devrait savoir suivre le convaincant atelier créatif dont Le royaume sait faire preuve.
À noter que malgré l’ère du numérique, Amylie se fait plaisir et redonne vie aux chansons cachées une minute suivant la fin de «Volcan», sa pièce finale.
Appréciation: ****
Crédit photo: Frédéric Bouchard
Écrit par: Jim Chartrand