«Tsukushi» de Aki Shimazaki: le bonheur est-il éphémère? – Bible urbaine

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«Tsukushi» de Aki Shimazaki: le bonheur est-il éphémère?

«Tsukushi» de Aki Shimazaki: le bonheur est-il éphémère?

Publié le 22 mars 2012 par Éric Dumais

Crédit photo : Leméac Éditeur

Tsukushi est le quatrième volet du second cycle romanesque de l’auteure montréalaise d’origine japonaise Aki Shimazaki. Après avoir fait paraître les romans Mitsuba (2006), Zakuro (2008) et Tonbo (2010) chez Leméac Éditeur, voilà que l’écrivaine, établie au Québec depuis 1991, récidive avec une nouvelle mise en scène de personnages gravitant tous autour de la compagnie d’import-export Goshima.

«Les deux tsukushi se dressent, presque de la même taille, sur un fond de teintes pastel. Ils sont couleur de peau, avec des nuances différentes: l’un plus foncé, l’autre plus pâle. Je murmure, malgré moi: «sensuel…». Je regarde l’autre face. Là, il y a un mot écrit en anglais: «fraternity».Ce mot est placé en bas à droite, très discrètement.»

Nul besoin d’avoir lu en entier la précédente trilogie pour être bien à l’aise avec l’univers singulier de Tsukushi. La porte d’entrée, si vous êtes avides de découvertes, est entrouverte et vous n’avez qu’à franchir le seuil et vous laisser guider par la force narrative d’une auteure qui mérite d’être révélée au grand jour.

L’existence de Yûko, son mari Takashi Sumida et leur jeune fille Mitsuba, âgée de 13 ans, semble parfaite. La famille possède, en plus d’un bonheur conjugal sans précédent, une propriété huppée, des domestiques attentionnés veillant à la propreté de leur demeure et, en plus, d’une fortune leur assurant sécurité et aisance pour le restant de leur vie. Or, à l’occasion du treizième anniversaire de Mitsuba, la vie de Yûko chamboule drastiquement lorsque d’anciens souvenirs, jusqu’alors tapis dans l’ombre, refont bientôt surface. Et cette image, obsédante, sensuelle et érotique de deux tsukushis peints sur une boîte d’allumettes… De fil en aiguille, Yûko se remémore sa vie passée, ses fiançailles avec T. Aoki, qu’elle a laissé tomber, jadis, pour Takashi, de l’enfant qu’elle a eu avec ce dernier et qu’elle a tout de même souhaité garder, pour le meilleur et pour le pire… Incapable de conserver son secret plus longtemps, Yûko dévoile la vérité à son mari, qui semble n’avoir aucune objection à élever l’enfant comme s’il était le sien. Bientôt, Yûko découvre des imperfections dans sa vie conjugale qui vont peut-être changer le cours de son existence ou, pire encore, la transformer à jamais.

À l’instar du roman Coma de l’écrivain montréalais François Gilbert, Aki Shimazaki a imaginé une histoire purement réaliste avec pour décor le Japon et ses mœurs. L’histoire de Yûko, plus précisément, peut être celle d’autres femmes, et c’est probablement l’évidence de cette constatation qui donne davantage de poids à l’intérêt qu’un lecteur peut porter à l’égard d’un tel roman. La force d’Aki Shimazaki, c’est l’aisance avec laquelle elle réussit à instaurer un décor chaleureux mais inconfortable, à créer des personnages sympathiques mais mystérieux, le tout baigné par l’aura envoûtante de la voix de la narratrice. Plusieurs apprécieront, au final, le petit glossaire joint à l’ouvrage, qui résume succinctement les termes japonais employés au fil du récit. Une œuvre infiniment petite mais d’une grande richesse.

«Tsukushi»
Leméac Éditeur
136 pages

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