Oxmo Puccino avec D-Track au Métropolis de Montréal – Bible urbaine

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Oxmo Puccino avec D-Track au Métropolis de Montréal

Oxmo Puccino avec D-Track au Métropolis de Montréal

Place aux poètes de demain

Publié le 13 juin 2016 par Elise Lagacé

Crédit photo : Mathieu Pothier

C'est un D-Track honoré qui chauffait les planches, samedi soir, pour l'un des monstres du rap français Oxmo Puccino. Le jeune rappeur, originaire de l'Outaouais, ne s'était pas caché de vivre là un grand moment de sa carrière en faisant la première partie de l'une de ses idoles. D-Track s'est ainsi montré à la hauteur, et si la réputation du Roi du rap n'est pas surfaite, force est d'admettre qu'en voilà peut-être un de ses princes.

Ému, enthousiaste, accompagné de plusieurs musiciens et d’un comparse à la voix, D-Track a lancé le bal. Avec plusieurs de ses compositions, voguant entre rap, jazz, funk, pop et surtout slam, il nous a fait la preuve par quatre de son talent d’interprète et de parolier-poète. Entre autres avec I Slam, texte magistral tiré d’«Interlude» (EP paru fin 2014), on constate que si le projet musical de D-Track s’avère riche en textures et sonorités, c’est définitivement sur le plan des textes qu’il se démarque. Champion de la métrique, la césure n’a pas de secret pour lui et son énergie contagieuse, comme son approche authentique et spontanée, nous l’ont révélé aussi talentueux que sympathique.

Après un battement d’une vingtaine de minutes, lorsque Puccino, théâtral, a fait son entrée, on ne pouvait que s’incliner devant la présence majestueuse du vétéran du rap français. Très à son aise dans ce Métropolis qu’il connaît bien, il a rapidement pris contact avec la foule conquise pour nous servir son album Voix lactée et ses hits tels que «Slow Life (encore tout chaud)», ainsi que certains de ses classiques. Dans un ensemble contrôlé, au pacing presque monotone et ponctué de jeux d’éclairages divinement datés, stroboscopes et jets des rotateurs découpés dans la brume diaphane, on voyait se découper les contours d’une évidence: la classe, la grande classe.

Il sait bouger, occuper l’espace et rassembler la foule sur des collaborations spontanées. Du charme et de la prestance à revendre, qui portent une voix profonde et travaillée dont les inflexions mesurées rendent à merveille la poésie des textes qu’il compose lui-même pour la plupart. Ça sentait l’expérience; clairement le rappeur est au top de la forme et de l’élégance.

Voilà effectivement le point où Puccino se distingue. Au-delà de la maîtrise des mots et des phrasés poétiques, qu’il chante, slame et récite avec ampleur et aisance, il parvient à surclasser le rap pour le faire entrer chez les bourges. Il demeure fidèle à cette tradition musicale qu’il représente, mais là où son homologue américain, le très «crotté» Notorious B.I.G., ne pouvait que s’aliéner les bien-pensants et leurs oreilles chastes, Oxmo Puccino peut se vanter de contribuer à rallier au rap ceux qui auraient eu peur d’en salir leur playlist.

Mais si Puccino se réclame du rap, il était clair qu’il se réclamait également de la tradition française sur le plan de l’interprétation. Mesure, contrôle et précision, l’interprète domine la matière et non l’inverse et si on ne peut que s’extasier devant tant de finesse, alliée au flegme et à l’assurance du charme français, la spontanéité et le guts de D-Track en sont venus à cruellement nous manquer. Parce qu’en effet, on a beau le surnommer le «Black Jacques Brel», on peut se demander à raison si la comparaison n’est pas un peu bancale étant donné ce pied de nez à l’émotion. Maître des mots, peut-être, mais le King Oxmo ne possède pas cette propension à se laisser aller dans des émotions à fleur de peau,  incontrôlables, plus grandes que soi, celles-là même où Brel piochait à chaque performance.

Mais voilà aussi ce qu’est le rap, un genre musical très souvent intellectualisé, émotivement désengagé, généralement très abouti et contrôlé, malgré des dehors un peu roughs. Peu importe, car la beauté du rap et de ses sous-genres, c’est de demeurer toujours résolument humaniste, profond et inclusif. On le voit aux foules bigarrées qui s’assemblent devant leurs scènes. C’est de ce règne,  le règne de ses indomptables et fougueux poètes de demain, dont le grand Oxmo est roi.

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Par Mathieu Pothier

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