«Alphonse Desjardins 1854-1920» par Guy Bélanger: portrait d’un défenseur des Canadiens-Français – Bible urbaine

Littérature

«Alphonse Desjardins 1854-1920» par Guy Bélanger: portrait d’un défenseur des Canadiens-Français

«Alphonse Desjardins 1854-1920» par Guy Bélanger: portrait d’un défenseur des Canadiens-Français

Publié le 31 octobre 2012 par Evelyne Ferron

Détenteur d’une maîtrise en histoire de l’Université de Montréal et à l’emploi de la Société historique Alphonse-Desjardins, Guy Bélanger était l’homme tout indiqué pour produire un des très rares portraits de l’homme derrière le mouvement des Caisses populaires Desjardins, qui s’inscrit dans l’histoire de la lutte des Canadiens-Français pour s’imposer davantage dans une économie de plus en plus capitaliste au tournant du 20e siècle.

S’appuyant sur l’action démocratique des caisses, il a la ferme intention de convaincre les classes laborieuses de ne pas tout attendre des gouvernements et de les inciter à se prendre en mains et à gérer elles-mêmes leurs propres affaires.

Bien que son nom nous soit plus que familier, nous connaissons peu dans les faits cet homme qu’a été Alphonse Desjardins. Cette biographie historique très détaillée et complète de près de 700 pages permet enfin de mieux connaître celui qui allait tout mettre en œuvre pour sortir les Canadiens-Français de leur marasme économique dans le boom provoqué par la révolution industrielle en Amérique du Nord. Plutôt que de s’intéresser à lui à travers l’histoire du mouvement des Caisses Populaires Desjardins, Guy Bélanger nous offre le portrait d’un homme, d’un militaire, d’un journaliste, d’un citoyen et surtout, d’un défenseur des Canadiens-Français quelque peu lésés dans le contexte économique canadien de la transition du 19e au 20e siècle.

Cette biographie s’intéresse bien évidemment à la vie de cet homme d’origine modeste, né Gabriel Alphonse Desjardins le 5 novembre 1854 à Lévis. Les quatre premiers chapitres nous amènent dans le parcours quelque peu singulier de cet homme, qui eut à passer par la milice avant de faire carrière dans le journalisme où il s’illustrera de diverses façons et démontrera sa vivacité d’esprit et sa rigueur. À travers cette carrière, nous suivons un homme qui comprend bien, contrairement à d’autres, les changements majeurs de son époque, notamment d’un point de vue économique et social. Un homme qui réalise que les premières institutions bancaires sont avant tout possédées par des anglophones, qui empêchent les Canadiens-Français d’obtenir des prêts pour moderniser leurs fermes ou leurs entreprises pour se démarquer dans une nouvelle économie, plus industrielle et conséquemment plus capitaliste.

Dès le cinquième chapitre, nous y voyons donc très bien le contexte historique, politique, économique et surtout social qui amène Alphonse Desjardins à créer la première coopérative financière pour les Canadiens-Français à Lévis en 1901. Guy Bélanger tricote cette histoire avec la vie personnelle de cet homme qui était avant tout un intellectuel soucieux de voir les siens développer leurs compétences et s’imposer dans un marché trop dominé par une élite économique canadienne-anglaise. Le livre nous montre aussi ce qui explique le rayonnement du mouvement Desjardins à l’extérieur du Québec à travers la maladie de son fondateur et son inévitable mort.

En mélangeant ainsi habilement la vie personnelle et la mission plus professionnelle d’Alphonse Desjardins, Guy Bélanger offre le portrait historique d’une époque plutôt que de se limiter uniquement au style biographique. Ce qui est tout à son honneur car le tournant du 20e siècle est riche en événements dans l’histoire du Québec, du Canada et des États-Unis. Le livre est très bien documenté et appuyé de nombreuses références en notes de bas de page qui témoignent de la qualité de la recherche derrière la biographie. L’auteur a même ajouté une chronologie en annexe qui sert bien ceux et celles qui désirent bien se situer dans la vie de Desjardins et dans son époque riche en rebondissements.

Même s’il s’agit avant tout d’un ouvrage historique riche en détails parfois complexes, l’ouvrage est loin d’être destiné uniquement aux historiens et étudiants en sciences politiques et économiques. La langue est accessible pour le grand public, qui, même s’il n’est  pas toujours intéressé par l’histoire de la Nouvelle-France ou du 18e siècle, risque ici de vraiment apprécier ce parcours dans une époque où ses ancêtres ont eu encore une fois à se battre pour s’imposer dans leur propre milieu.

Appréciation: ****

Crédit photo: Les éditions du Septentrion

Écrit par: Evelyne Ferron

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