LittératureL'entrevue éclair avec
Crédit photo : Éditions Jonglez @ Tous droits réservés
Philippe, quel plaisir de vous accueillir à cet entretien! Vous êtes journaliste et photographe indépendant, ainsi qu’auteur de guides sur le Canada et plus particulièrement sur la Ville de Montréal, votre lieu d’adoption depuis 2006, déjà! Dites-nous donc, qu’est-ce qui vous a motivé, à l’époque, de plier bagage et de faire vos adieux à l’Europe, pour venir vous installer à plus de 5 000 kilomètres… au Québec?
«C’est avant tout une histoire d’amitié alors que j’étais étudiant en journalisme en France à l’École Supérieur de Journalisme (ESJ). J’y ai rencontré un jeune journaliste québécois en stage qui travaillait pour Radio-Canada.»
«À la fin de mes études, il m’a invité à lui rendre visite, et c’est là que j’ai eu la piqûre. J’ai pu rencontrer les journalistes de la radio de Radio-Canada et ensuite faire mes premières piges pour eux depuis Paris, notamment pour l’émission de Michel Desautels.»
«Ensuite, les voyages se sont enchaînés. Devenu photographe et rédacteur, j’ai eu la chance d’effectuer de nombreux voyages au Canada afin de travailler sur des guides, des livres photo ou des magazines de voyage.»
«C’est donc dans une certaine logique que j’ai décidé de m’installer à Montréal il y a 18 ans maintenant.»
Et qu’est-ce qui vous a tant plu dès votre arrivée à Montréal?
«Je dirais que ce sont surtout les Québécois et leur manière de voir les choses du côté positif, et aussi la façon dont le premier contact s’établit si facilement.»
«L’ADN nord-américain, ponctué de références européennes, m’a aussi séduit. J’ai aimé de Montréal son désordre et ses contrastes architecturaux, ses multiples influences et même ses errances. J’apprécie aussi son côté interculturel qui, j’espère, perdurera.»
«Sa découverte est une plongée au cœur du monde et de la vie!»
Votre amour pour Montréal n’a pas perdu une once de sa vigueur, puisque le 5 juillet dernier, vous avez fait paraître, aux Éditions Jonglez, Montréal: insolite et secrète, «un guide indispensable pour ceux qui pensaient bien connaître Montréal ou pour ceux qui souhaitent découvrir l’autre visage de la ville». Ainsi, dans ce livre de 288 pages, vous partagez les trésors cachés de la métropole à qui souhaite se dépayser à l’abri des regards, dans sa propre ville! Dites-nous tout: combien de temps avez-vous passé à la préparation de cet ouvrage, et comment avez-vous fait — c’est là votre tour de force! — pour dénicher tous ces endroits?
«Il s’agit de la troisième édition du guide. À chaque nouvelle édition, certains lieux ont disparu et d’autres sont arrivés.»
«Au départ, les 50 premiers lieux ont été faciles à dénicher, puisque j’ai fait appel à ma propre connaissance de la ville avec l’aide d’Internet! Pour les 40 suivants, j’ai rencontré des guides et des amoureux de la ville, des spécialistes de sa sauvegarde et de sa conservation, comme Dinu Bumbaru d’Héritage Montréal, qui m’ont proposé d’autres lieux. Et pour les 30 derniers (il y en a environ 120 dans le guide), je les ai trouvés en flânant et en interrogeant les gens sur place lors des reportages pour les sites déjà trouvés.»
«C’est un travail constant; il faut être curieux et savoir lever les yeux…»
On aimerait que vous titilliez la curiosité de nos lecteurs et lectrices: partagez-nous donc quelques lieux inusités dont vous faites référence dans votre ouvrage, en y ajoutant votre précieux commentaire! Pour le reste… il faudra se procurer votre livre!
«C’est difficile de choisir parmi tous ces lieux qui m’ont donné tant de plaisir lors de leur découverte!»
«De mémoire, je dirais les imposantes “géantes” du centre d’archives; le jardin du gouverneur joliment dissimulé à côté de la place Cartier; le morceau historique du mur de Berlin au Centre de commerce mondial; les surfeurs du Saint-Laurent, pour le plaisir de la photo sportive; les divers panoramas moins fréquentés, que ce soit sur l’île Saint-Hélène ou le Mont-Royal; le fabuleux jardin des hospitalières caché par ses grands murs le long du parc Jeanne-Mance; le temple caodaïque pour l’accueil de sa communauté vietnamienne; les œuvres d’artistes urbains disséminées dans la métropole; la statue de Louis Cyr avec son style à la Botero; et, pour finir, la formidable et touchante histoire du cœur d’Auschwitz.»
Vous qui connaissez Montréal mieux que quiconque, «cette terre d’immigration qui s’est bâtie sur des vagues successives de nouveaux arrivants apportant un précieux bagage culturel», si vous aviez la chance de remonter le temps et d’y vivre à l’époque de votre choix, quel moment clé de l’histoire montréalaise choisiriez-vous, et pourquoi? On a le droit de rêver après tout!
«C’est une question intéressante. Remonter au temps de sa création semble intéressant sur le papier, car j’adorerais vérifier sur place les dires des historiens, mais l’époque me semble bien dangereuse et avec une espérance de vie beaucoup plus courte qu’aujourd’hui…»
«Bien sûr, les années 1920 et 1930, au temps de la prohibition et du Montréal Red Light des années 1950, séduisent l’amateur de films de gangsters et le lecteur de polars. Mais à bien réfléchir, c’est finalement la période présente que je choisirais, une période de grandes mutations avec l’arrivée de l’informatique omniprésente et maintenant de l’intelligence artificielle, dont Montréal est l’une des capitales en matière de recherche. C’est également une période de grande immigration aussi, avec ses avantages et les défis qu’elle représente.»
C’est une ville toujours tournée vers l’avenir et qui a encore tant à donner.»