LittératureRomans québécois
Crédit photo : Alto
Humide, nuageux, gris, Saint-Priest-la-Brume, village français, est tout cela. On pourrait même dire un peu étrange, pas au sens d’inquiétant, mais plutôt de particulier. Amédée, un des protagonistes de l’histoire, vit et travaille à cet endroit. Dans une scierie il s’active tous les jours de la semaine, une semaine qu’il préférerait d’ailleurs sans lundi. Il faut dire que cette journée est associée au recommencement, à la routine quoi. Le lecteur découvre vite un autre personnage, Goguenard, le patron d’Amédée, toujours prêt à s’embarquer dans une combine qui fera rouler ses affaires. Le tableau est vite brossé, c’est le cas de le dire, puisque l’on apprend que deux hommes, les frères Lazar et Grigor Crasimir, sont à la recherche d’une toile qui leur revient, disent-ils. En plus, Goguenard semble impliqué dans cette histoire… La fille du soir, œuvre picturale d’un dénommé Muntt, causera bien des remous dans la vie de ces hommes.
D’origine allemande, la toile appartient à nul autre que Raoul de La Mothe Grébière, un riche retraité qui, à cause de son Alzheimer, oublie des choses essentielles comme les œuvres qu’il possède. De fait, les frères Crasimir profitent des problèmes de mémoire de l’homme pour lui revendre ses propres œuvres à des prix exorbitants. Et ce stratagème est même utilisé à de nombreuses reprises pour le même tableau! S’en suivra des péripéties entrecoupées par l’arrivée d’autres personnages.
Malheureusement, on se perd quelques fois à travers cette première partie du récit avec tout ce qui englobe les personnages: caractéristiques, incartades, souvenirs, etc. On constate que l’auteur sait manier les mots et les tournures de phrases, mais parfois, certains jeux de mots peuvent paraître agaçants. «Heureusement, la vie est bien faite, les scieurs sont rarement des pianistes, ou alors seulement des interprètes de récitals en scie mineure.»
Plus captivante que la première, la deuxième partie du roman intitulée «Avant» nous plonge en pleine occupation allemande en France lors de la Seconde Guerre mondiale. Le tout débute avec de nouveaux personnages dont les Ackerman, une famille d’origine alsacienne. Étant directement visée par le contrôle d’identité à cette période de l’Histoire, la famille aura comme destination d’exode Saint-Priest-la-Brume. On retrouvera d’ailleurs La Mothe Grébière en tant que «secrétaire aux questions juives de la préfecture de la Creuse». De plus, on découvrira qui est le fameux artiste Muntt…
Férandon fait bien vivre au lecteur cette époque trouble avec les manières de contourner le danger qui sont utilisées ainsi que les mensonges qui sauvent la vie. C’est à travers les personnages qui composent cette partie du roman que l’auteur réussit à incarner l’atmosphère guerrière et inhumaine qui régnait un peu partout. Tout cela à l’aide de descriptions des comportements et des sentiments de ces gens fictifs bien différents les uns des autres. C’est un roman certes très imaginatif que nous offre l’auteur avec ses nombreuses péripéties et ses personnages uniques, mais qui semble inégal au final.
«Un lundi sans bruit», Max Férandon, Alto, 192 pages, 2014, 21,95 $.
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de la rédaction