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Crédit photo : Bonsound
Monogrenade est un groupe qu’on apprécie dès la première écoute. Planante et diversifiée, leur musique nous propulse dans un autre univers dont on ne veut plus se défaire. Avec ce second album, les Montréalais nous convient à un voyage spatial: «Je ne suis pas là, je suis quelque part dans l’espace, entre les voix et le trafic orbital. Je suis fait d’encre et de poussière, de coïncidences imaginaires», invitation qu’ils nous dévoilent en guise d’ouverture.
Ainsi, dès l’enchanteresse introduction instrumentale intitulée «Portal», l’auditeur est propulsé dans les confins de la galaxie et on renoue avec les cordes singulières du groupe. Celles-ci seront grandement épaulées tout au long de l’album des Mommies on the Run, leurs collaboratrices de la veille, comme de multiples instruments invités tels que le violoncelle, le cor français, l’alto et des violons.
Puis, la pièce-titre se déploie tout en lenteur et délicatesse. Alors qu’on nous chante «D’une sève de peine, d’un élan dans tes veines reviennent les mêmes pôles imaginaires» pour nous bercer, c’est une voix réconfortante qui nous chuchote ces poétiques paroles qui sauront nous guider à travers notre écoute.
L’enchaînement des pièces est programmé au quart de tour et alors qu’elles se succèdent à un rythme maîtrisé. Le groupe affiche désormais une assurance encore plus prenante que celle qu’il exhibait lors de ses premiers efforts. Certes, on continue d’explorer différents horizons comme sur la très funky «Phaéton», qui agit au rythme de pulsations effrénées, en plus de se lancer dans des élans instrumentaux ici et là, mais on présente aussi un ensemble plus concis qui suit une logique indéniable.
On craque pour «L’aimant», qui nous emporte dans un irrésistible tourbillon. On se délecte de l’apparition fort bienvenue de Marie-Pierre Arthur sur «Labyrinthe». Les paroles, comme la musique, hésitent entre une nostalgie aussi mélancolique que pleine de promesses, dérivant entre les dédales d’un romantisme condamné et d’un autre naissant aussi enflammé, douloureux, qu’inévitable.
Pour cela, il faut probablement honorer le grandissime talent de Jean-Michel Pigeon qui a, comme sur Tantale, agit à titre de véritable chef d’orchestre. En assumant l’écriture des textes, la composition des mélodies, mais également la réalisation de l’album, il endosse de surcroît toutes sortes de fonctions plus techniques telles que la prise de son et le mixage. De plus, il joue du piano, du synthétiseur et de la guitare, tout en étant la voix principale du groupe lorsqu’il n’est pas accompagné de l’attachante Marianne Houle. On est apparemment convié dans le plus profond de ses pensées, mais aussi de son savoir-faire, comme son indéniable complicité avec Mathieu Collette et François Lessard, les deux autres membres du groupe.
On prend compte de la maturité que le groupe a acquise de la première à la dernière minute de l’album. Que ce soit sur les envolées audacieuses et déchaînées de la conclusion avec «Le fantôme», ou sur l’accrocheuse «Métropolis», qui rend hommage au film culte de Fritz Lang, on n’y résiste pas. Encore moins sur la sublime «Tes yeux», véritable ballade romantico-pop qui nous séduit avec ses paroles joyeusement et sensiblement kitsch: «Je pourrais m’y perdre et m’y perdre des kilomètres encore. Tes yeux dans ma tête reviennent, se décalquent au décor.»
Composite est donc un grand pas en avant pour un groupe qui nous avait pourtant déjà convaincu. Avec une expertise encore plus apparente et des mélodies qui nous trottent longtemps en tête après l’écoute, en plus des paroles à l’imaginaire poétique assuré, Monogrenade a conçu un album qui ne peut que mieux s’apprécier au fil des écoutes alors qu’on en découvre tout le travail et la finesse.
«Composite» de Monogrenade est disponible en format compact, numérique et vinyle à compter du 4 février prochain.
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de la rédaction