Littérature
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Casino et littérature victorienne: je t’aime moi non plus
Pour comprendre en profondeur la dynamique du casino dans la littérature victorienne, par exemple, il est essentiel de comprendre le contexte dans lequel s’inscrivent ses auteurs. Il aura fallu attendre le règne d’Elisabeth I pour que la loterie soit autorisée pour la première fois dans le pays. Depuis lors, le jeu est devenu non seulement un moyen pour les gens de se divertir, mais aussi un moyen de lever des fonds pour les différents besoins caritatifs du pays et de sa capitale.
Dans ce contexte, c’est à la fin du XVIIIe siècle que Fanny Burney décrit, indirectement, bien sûr, le joueur de casino comme un personnage qui exprime librement ses émotions à l’aide des dés et des cartes. De son côté, Henry Blyth, dans son Hell and Hazard, évoque un loisir accessible uniquement à la haute bourgeoisie, et le contraste entre les amateurs de casino et la réalité des ouvriers dans les mines de charbon galloises.
Le jeu comme une forme de vice
Jane Austen évoque également, avec une forme de répulsion, les plaisirs des jeux d’argent, notamment à travers la figure du fils gâté, qui joue tout ce qu’il possède aux courses de chevaux (Mansfield Park) et aux salles de jeux à Bath (Northanger Abbey), mais se garde bien de faire de ses personnages principaux de grands joueurs.
Le jeu reste perçu comme un vice de la littérature victorienne. Le plus souvent, il apparaît dans le roman pour venir contrarier les héros, qui perdent eux-mêmes, ou dont les proches connaissent la ruine en raison de leur amour un peu trop prononcé pour le casino. De nombreux auteurs de l’époque victorienne utilisent les jeux de chance ou d’adresse pour signaler certaines qualités ou défauts chez leurs personnages. Comme l’impulsivité ou la réflexion, l’agressivité ou le calme, la faiblesse ou la force, etc.
Le casino dans la littérature moderne
Plus que dans les films, les séries – qui ont également inspiré la création de slots – ou la musique (qui insiste beaucoup sur le côté glamour), la littérature s’est penchée sur le casino pour en décrire les travers et montrer les ressorts d’un univers dominé par la chance et l’argent, et dans lequel peuvent se perdre leurs héros. On ne mentionnera pas, ici, les innombrables bouquins techniques destinés aux joueurs eux-mêmes, mais bel et bien de romans.
Dans la littérature du XIXe et XXe siècle, le casino devient cependant non plus un ressort pour exprimer les forces et les faiblesses de ses personnages, mais bien un lieu d’intrigue idéal pour évoquer, certes, les turpitudes de l’âme humaine, mais également pour profiter des éléments de suspense et de mystères propres aux jeux de hasard.
Un exemple parfait de ce virage est le premier roman dédié à l’agent 007, Casino Royale. Publié en 1953, ce roman d’espionnage classique raconte l’histoire de James Bond, l’un des meilleurs agents des services secrets britanniques. Bien que le livre ne soit pas exactement dédié au jeu, la plus grande partie de l’intrigue se déroule dans un casino français, où 007 rencontre Le Chiffre, un espion russe qu’il affrontera dans tout le roman.
Plongée à Las Vegas
On peut également citer La maison gagne toujours (ou The House Always Wins pour le titre original) de Brian Rouff. L’auteur y raconte l’histoire d’Anna Christiansen, une femme d’une petite ville qui décide de déménager à Las Vegas. Après s’être mariée, Anna achète une vieille maison et entre en conflit avec le propriétaire corrompu du casino qui veut acheter sa propriété. On retrouve dans cet ouvrage les liens entre casino et vice, et l’attrait de l’argent comme une forme de déviance.
Idem dans Peur et dégoût à Las Vegas de Hunter S.Thompson, qui lie les revers du rêve américain avec ceux des casinos et jeux d’argent. Raoul Duke, le protagoniste du livre, est un journaliste chargé de réaliser un reportage sur la course de motos qui se déroule dans le désert de Mojave. Il emmène avec lui son avocat, le Dr Gonzo, et les deux protagonistes plongent dans la drogue.
Bien que le livre, et plus tard le film dans lequel joue l’acteur Johnny Depp, ne parle pas uniquement de l’univers des casinos, il en dit long sur la culture du péché à Las Vegas dans les années 70.